COMPARATIF

parut dans moto magazine N°180 de septembre 2001 http://www.motomag.com

Kawasaki 750 ZR-7S  /  Suzuki GSX 750
Yamaha FZS 600 FAZER  /  Honda CB 600 F Hornet

Les fantasmes générés par les gros roadsters ont tendance à rejeter dans l’ombre les basiques de moyenne cylindrée. Il est pourtant inutile d’avoir des monstres de puissance, délicats à emmener et chers à entretenir, pour se faire plaisir et aller au boulot. Et une bonne part des motards ne s'y est pas trompée, puisque quelques 600 et les 750 basiques figurent au hit parade des ventes. Equipée d’un tête de fourche ou non, elles rencontrent un véritable succès auprès des jeunes et des moins jeunes, grâce à un prix encore abordable et une excellente polyvalence. A n’en pas douter, la catégorie 600 est devenue aujourd’hui une référence avec des mécaniques modernes avoisinant souvent les 100 chevaux. Par ailleurs, elle est portée par l’effet médiatique des courses de 600 Super-sport. De fait, elle véhicule une image plus fun. Si les 750 cm3 ont fait la gloire des années quatre-vingt elles se font rares au catalogue. Dotées de mécaniques plus anciennes pour ne pas gonfler la facture, elles font de la résistance en arborant une esthétique plus sobre. Pour vous aider à mieux choisir entre ces moyennes cylindrées, nous avons mis en lice la Yamaha FZS 600 Fazer, référence dans la catégorie ; la Honda 600 Hornet naked au tempérament plus sportif ; la Kawasaki 750 ZR-7S, équipée d’un tête de fourche et toujours motorisée par le propulseur refroidi par air de feu la Zephyr ; et enfin la GSX 750 dont la rondeur des lignes dégage un parfum de nostalgie. Elle reprend par ailleurs le quatre-cylindres refroidi par air et huile de la sportive GSX-R... datant d’une dizaine d’années.

La Yamaha 600 Fazer représente le
meilleur compromis pour allier les
trajets quotidiens et les voyages
ponctués d'une note sportive.
Son moteur se montre très
performant et sa partie-cycle
au dessus de tout soupçon.

La Fazer bénéficie de sa conception récente mais c’est la plus chère

Prise en main et position. Dès les premiers tours de roues les machines dévoilent leurs prédispositions. La Kawasaki propose une position de conduite d’une bonne routière. Le grand guidon aux commandes entièrement réglables tombe naturellement sous les mains et offre une position confortable. Les grands y prennent place avec bonheur. Les débutants devront prendre garde à ne pas se laisser déséquilibrer lors des manœuvres à l’arrêt par les 235 kg tous pleins faits. La Kawa est la moto la plus lourde du comparatif (35 kg de plus que la Hornet), et son centre de gravité un peu haut. La Suzuki GSX 750 fait grosse moto par ses volumes généreux. Avec une selle confortable et basse, accessible aux motards d’1m70, une position droite et un guidon à bonne distance, la Suzuki se manie aisément à basse vitesse. En revanche, son réservoir encombrant et son poids conséquent demandent de l’attention lors des demi-tours. Dans la famille des 600 cm3, la Honda est la moins conviviale à cause d’une position de conduite basculée sur l’avant, d’une selle dure comme une planche et de repose-pied placés très haut. Mais son poids plume (moins de 200 kg tous pleins faits) rassure lors de la prise en main. La Yamaha FZS 600 Fazer cumule toute les qualités. La position de conduite est décontractée, la selle est accueillante et les commandes sont douces et la machine est légère. La confiance vient immédiatement pour effectuer les manœuvres. Sur ce chapitre la 600 Fazer sort donc gagnante.

La Kawasaki ZR-7S
souffre de ses suspensions
trop souples et de son
freinage trop timide. En
revanche, son tête de fourche
protège bien de la pression du
vent. Elle aime rouler longtemps
en enroulant.

Avec son carénage la ZR-7S cherche à bousculer la Fazer

Aptitudes au voyage. Sur l'autoroute A6 qui mène prés d'Avallon les 750 présentent l'avantage de tourner moins vite que les 600 à vitesse égale. Les « grosses » bénéficient de leurs 150 cm3 supplémentaires mais aussi d’une conception axée sur le rendement à moyen régime plutôt que dans les tours : puissance maxi à 9500 tr/min contre 11500 et 12000 tr/min pour la Fazer et la Hornet. Un gage de longévité. Autre conséquence, une consommation moindre pour la Kawa et la Suz à 130 km/h, vitesse stabilisée. Un litre d'écart entre la ZR-7S et la Hornet (voir mesures). Côté protection, la Fazer est disponible uniquement avec son tête de fourche et la GSX 750 en version naked. La ZR-7 et la Hornet existent pourvues ou non de cet élément protecteur. Jusqu’à 130 km/h toutes les machines sont vivables ; au-delà la protection d’un carénage n’est pas négligeable d’autant que toutes ces motos sont capables d’atteindre, voire dépasser 200 km/h. Chacun pourra se déterminer selon ses préférences esthétiques. Pour ce qui concerne le confort ou les sensations voir encadré.

La Hornet est une machine joueuse.
En l'absence de béquille centrale,
elle bénéficie d'une meilleure garde
au sol. Sa position de conduite basculée
sur l'avant est fatigante à la longue.

Facile d’accès la Hornet se transforme en virulent roadster dans les tours

Couple ou puissance ? Au-delà du style ou de la position de conduite, ce qui distingue nettement les 600 cm3 des 750 est sans conteste le moteur. Avec une puissance passant 90 ch, la Yamaha et la Honda disposent de mécaniques modernes et d’un tempérament plus sportif. Et pour cause, le moteur de la Fazer est issu de la Thundercat et celui de la Hornet de la CBR. Ce sont d’ailleurs les seuls moulins à refroidissement liquide. À l’ouverture des gaz à bas régime, vers 3000 tr/min, il faut prendre son mal en patience pour que ça commence à causer. A ce jeu-là, la Fazer se montre plus volontaire car sa transmission finale est très bien adaptée. Ce n’est le pas le cas pour la Hornet qui tire trop long. Pour une meilleure expression du moteur, la couronne arrière mériterait deux ou trois dents de plus. Sur autoroute et sur les derniers rapports, il est en effet impossible de prendre le régime maximum.
En sortie de village les 750 cm3 donnent une meilleure sensation d’accélération même si les chiffres de reprises de 50 à 90 km/h sont quasiment équivalentes pour les quatre protagonistes. Notons quand même que la Suzuki GSX de ce comparatif comptant seulement 100 km au compteur devrait faire mieux une fois rodée et libérée. Avec un couple plus généreux, le conducteur joue moins de la boîte de vitesses et la conduite est moins heurtée sur les deux grosses. Ceci ne voulant pas forcément dire confortable car la Kawasaki ZR-7S n'est pas avare en vibrations désagréables entre 4000 et 6000 tr/min.
Les 600 cm3 se comportent tout autrement. Dès que le compte tours passe la barre des 6000 - 7000 tr/min, elles s'envolent. Leurs quatre-cylindres à très faible inertie prennent des tours avec entrain. Seule la Suzuki GSX arrive à tenir tête aux deux petites fougueuses ; il faut dire que le bloc à 16 soupapes de l'ancienne 750 GSXR n'est pas du genre à s’effrayer devant les jeunettes. Mais la différence de puissance (7 ch) finit par se faire sentir. Mais flirter avec le régime maxi n'est ni utile ni raisonnable car les vitesses atteintes sont trop élevées ; de fait, les 750 restent dans le coup.
Voilà donc ce qui fait le succès respectif des 600 ou des 750. D’un côté des moteurs joueurs issus de machines sportives capables de prendre entre 12000 et 13000 tr/min dans un miaulement du diable. De l’autre, des mécaniques plus coupleuses qui gardent leur calme, en harmonie avec leur apparences placides et les vitesses usuelles.
Côté sélection, les envolées lyriques de la Yamaha sont ponctuées de « clac »ou de « cracs » venant de la boîte de vitesses. Le passage de la première à la seconde est trop long et celui de la seconde à la troisième accroche. Dommage. La boîte de la Kawasaki souffre d’un mal moins dérangeant : elle est lente et nécessite une décomposition du geste et son sélecteur demande du doigté ... de pied. La Honda et la Suzuki disposent d’une sélection rapide, précise et silencieuse.

La partie-cycle de la GSX est une réussite sur tous
types de revêtements. De plus, la position de conduite
droite et la selle confortable permettent de rouler
longtemps sans se fatiguer.
Dommage que l'autonomie
soit juste et que la
mécanique surchauffe
les jambes en été.

Homogène et coupleuse la GSX tient la dragée haute aux fougueuses 600

Excitation ou décontraction. A l’image de sa motorisation, la 750 GSX se démarque par son choix technique en matière de suspension arrière. Elle dispose d’un double combiné classique alors que les autres optent pour le monoamortisseur. La Fazer est la seule à offrir un réglage en précontrainte de la fourche. Le verdict est cependant indépendant de la cylindrée ou des choix techniques. Ballottée sur les départementales cahoteuses de la Drôrne, la 750 Kawasaki s’est attiré les foudres des essayeurs. Sur les successions de bosses l’arrière a tendance à pomper et l’avant jette l’éponge tout en survirant copieusement en virage. Un vrai Zebulon ! Le durcissement de la suspension arrière s’impose pour palier ces réactions, mais au détriment du confort. La ZR-7S se montre toutefois saine si le rythme est tranquille La Honda avec un amortisseur monté sans biellette, réclame aussi un accord de suspension parfait sur chaussée dégradée pour garder sa superbe. Rigide, dure de suspension, elle ne ménage pas son conducteur sur les bosses. Sa mécanique rageuse est bien servie par un châssis très sain et une garde au sol sans reproche - mais il n’y a pas de béquille centrale. Il faut aimer le sport ou passer son chemin. La Suzuki et la Yamaha offrent un accord de suspension avant/arrière parfait. Sur les bosses, la GSX se montre assez ferme et la Yamaha plus souple tout en proposant une tenue de cap précise. En entrée de virage, alors que la Honda et la Yamaha se montrent très neutres la poussée sur le guidon, la Suzuki a tendance à légèrement engager. Phénomène qui peut être déstabilisant les premiers virages mais qui n’est en aucun cas dangereux.
Point fort de toutes ces machines, elles sont livrées avec des pneus de très bonne facture. Michelin Pilot, Bridgestone BT 57 et BT 020 rien que du bon.

Freinage. Il n’y a pas de différence flagrante entre les 600 et les 750, sur le papier. Pistes de freinages et étrier de freins sont comparables. Cependant les deux « petites » s’en sortent mieux. La Yamaha Fazer comme la Honda Hornet est une excellent freineuse et il ne faut aucun effort pour stopper les machines. La Suzuki offre une bonne décélération si le pilote empoigne fortement le levier car en début de course, les étriers n’ont que très peu de mordant. En comparaison, les prestations de la ZR-7S sont nettement en retrait. A l’avant comme à 1’arrière, il faut insister énergiquement sur les freins pour se ralentir. Dommage que Kawasaki n’ait pas corrigé ce défaut déjà relevé sur la version N. Le montage de plaquettes tendre devrait améliorer le mordant comme la puissance.
Les machines nous emmènent en haut du Mont Ventoux. Le temps se couvre et il n’est pas possible d’apercevoir le massif du Mont-Blanc … tant pis. Après plus de 200 km, la GSX passe en réserve suivie peu après par la Hornet. Avec le reste de carburant, il est possible d’entreprendre encore 50 km tout juste ce qu il faut pour rallier une station service ouverte un dimanche. La Kawasaki et la Yamaha sont surprenantes. Elles sont en effet capable de faire 300 km avant de passer en réserve. De vraies routières.

Bilan. Alors 600 ou 750 ? Après ce long périple dans la Drôme force est de constater que la Yamaha Fazer sort largement du lot avec une polyvalence et des prestations supérieures tant en moteur qu’en partie-cycle. A près de 49000 F c’est la plus chère. Ceux pour qui le tête de fourche n est pas une nécessité pourront se tourner vers les 750 Naked (moins chères et plus sages) ou vers la Hornet (moins chère et plus sport). La Kawasaki dans cette version S tente d’offrir les mêmes arguments mais elle est en retrait en matière de suspension et de freinage. Néanmoins son comportement apaisant et sa bonne autonomie en font une bonne rouleuse. Son prix, 45995 F (42 995 F en version Naked) est également alléchant. La Suzuki empruntant la même recette, moteur et partie-cycle à l’ancienne, est plus homogène. Ces performances sont suffisantes, sa tenue de route s’avère saine. Ses aptitudes au duo sont les meilleures et il est possible d’envisager de longs parcours à condition de montrer un petit saute-vent. Pour 43990 F, cette GSX est vraiment digne d’intérêt. Enfin la Honda Hornet est l’originale de ce comparatif. Ses atouts : une prise en main facile, un caractère enjoué, un châssis joueur et un tarif de 41000 F (45000 F en version S). C’est la moins coûteuse mais son utilisation au quotidien ou en duo est malheureusement grevée par l’absence d’aspect pratiques …

ÉTIENNE GARCIN-MARROU

PHOTOS STEPHEN CAILLET

AVEC LA PARTICIPATION DE CATHERINE DRUELLE, FREDERIC BROZDZIAK ET DAVID GAHNEM.

UN GRAND MERCI A LA CONCESSION STANDARD MOTOR (01 69 52 95 60) POUR LE PRET DE SA SUZUKI GSX 750

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